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Récit
22 €, 404 p.
ISBN : 978-2-36280-054-2
Format : 140/205 mm
Parution : 7 janvier 2015
Disponible en Ebook (13,99 €)
ISBN : 978-2-36280-054-2
Format : 140/205 mm
Parution : 7 janvier 2015
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Journal des africanistes Charles-Henry Pradelles de Latour, n°87, 2017 (2018)
[...] Dans les trois volumes de la « Trilogie coloniale », la parole, entièrement donnée à l’informateur, implique que le récit soit construit sur le mode d’un dialogue dont une seule voix est audible, l’autre étant uniquement suggérée. Les informateurs parlent toujours à la première personne et n’emploient le « tu » que pour répondre aux questions de Sophie Caratini que nous n’entendons pas, mais dont on devine le contenu à travers les réponses données, et pour faire écho à des questions qui relancent la narration. À ce moment-là, la destinatrice, n’est présente que par quelques allusions faites soit à l’ethnologue des Rgaybat, soit à la représentante du monde occidental, ou tout simplement à l’interlocutrice attentive et invisible. Cette oreille tendue est bienvenue ; elle met en contact direct les informateurs et les lecteurs.
Ainsi le lecteur suit-il avec un intérêt soutenu les récits ordonnés selon les étapes historiques d’un cycle de vie et présentés sous une forme romanesque souvent captivante. Les descriptions ethnologiques, nombreuses et toujours très détaillées, que ce soient l’élevage des chameaux, la culture du mil sur les bords du Sénégal ou les premiers soins donnés aux nourrissons, se lisent d’autant plus facilement qu’elles sont délivrées non pas pour leur valeur intrinsèque comme dans les monographies, mais pour éclairer des portions de vie et les rapports entre des proches, parents ou voisins. À tout moment la subjectivité l’emporte sur l’objectivité sans que celle-ci ait à en souffrir.
Les trois volumes contrastent ainsi avec ceux publiées dans la collection « Terres humaines » où les anthropologues se mettent eux-mêmes en scène en train de découvrir, parfois à leurs corps défendant, their people. Pour la première fois, ici, on nous montre que la fonction de l’ethnologue est aussi d’écouter et de laisser aux lecteurs le soin d’interpréter les données comme ils l’entendent. La « Trilogie coloniale » est novatrice tant par sa présentation personnalisée du matériel de terrain que par son approche littéraire, l’une n’allant pas sans l’autre. Le style accompagne l’œuvre.
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Ainsi le lecteur suit-il avec un intérêt soutenu les récits ordonnés selon les étapes historiques d’un cycle de vie et présentés sous une forme romanesque souvent captivante. Les descriptions ethnologiques, nombreuses et toujours très détaillées, que ce soient l’élevage des chameaux, la culture du mil sur les bords du Sénégal ou les premiers soins donnés aux nourrissons, se lisent d’autant plus facilement qu’elles sont délivrées non pas pour leur valeur intrinsèque comme dans les monographies, mais pour éclairer des portions de vie et les rapports entre des proches, parents ou voisins. À tout moment la subjectivité l’emporte sur l’objectivité sans que celle-ci ait à en souffrir.
Les trois volumes contrastent ainsi avec ceux publiées dans la collection « Terres humaines » où les anthropologues se mettent eux-mêmes en scène en train de découvrir, parfois à leurs corps défendant, their people. Pour la première fois, ici, on nous montre que la fonction de l’ethnologue est aussi d’écouter et de laisser aux lecteurs le soin d’interpréter les données comme ils l’entendent. La « Trilogie coloniale » est novatrice tant par sa présentation personnalisée du matériel de terrain que par son approche littéraire, l’une n’allant pas sans l’autre. Le style accompagne l’œuvre.
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Traversées Mauritanides Bios Diallo, 12 janvier 2017
Sophie Caratini, la sagesse des péchés
Interview
Traversées Mauritanides : Comme chez La Fille du chasseur, on sent l’influence de l’anthropologie dans Les sept cercles. Les faits sont-ils indissociables ?
Sophie Caratini : Je me réjouis que vous ayez perçu l’influence de l’anthropologie dans ces textes qui résultent effectivement d’une démarche scientifique et reposent non seulement sur le recueil de la parole des personnes interviewées mais également sur un important travail de recherche complémentaire, d’enquêtes parallèles auprès d’autres personnes et de nombreuses lectures et analyses comparatives des phénomènes, le tout reposant sur ma propre expérience de recherche en Mauritanie dans son ensemble. Mon objectif était à la fois d’opérer une transposition de ces paroles, en des récits littéraires, et d’y inscrire directement ou en filigrane plusieurs niveaux de lectures possibles. En quelque sorte, ces livres sont destinés à la fois au grand public et aux spécialistes de la région et/ou de la discipline. [...]
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Interview
Traversées Mauritanides : Comme chez La Fille du chasseur, on sent l’influence de l’anthropologie dans Les sept cercles. Les faits sont-ils indissociables ?
Sophie Caratini : Je me réjouis que vous ayez perçu l’influence de l’anthropologie dans ces textes qui résultent effectivement d’une démarche scientifique et reposent non seulement sur le recueil de la parole des personnes interviewées mais également sur un important travail de recherche complémentaire, d’enquêtes parallèles auprès d’autres personnes et de nombreuses lectures et analyses comparatives des phénomènes, le tout reposant sur ma propre expérience de recherche en Mauritanie dans son ensemble. Mon objectif était à la fois d’opérer une transposition de ces paroles, en des récits littéraires, et d’y inscrire directement ou en filigrane plusieurs niveaux de lectures possibles. En quelque sorte, ces livres sont destinés à la fois au grand public et aux spécialistes de la région et/ou de la discipline. [...]
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Cridem 24 septembre 2016
Rencontre Littéraire avec l’anthropologue Sophie Caratini et son éditeur Thierry Marchaisse autour de la Mauritanie
[...] dans le cadre de la saison 2 des « Liseurs Vagabonds », comité de lecture et d’échanges ayant pour ambition la valorisation de l’édition indépendante de création. Sophie Caratini et les éditions Thierry Marchaisse en sont les lauréats 2016.
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[...] dans le cadre de la saison 2 des « Liseurs Vagabonds », comité de lecture et d’échanges ayant pour ambition la valorisation de l’édition indépendante de création. Sophie Caratini et les éditions Thierry Marchaisse en sont les lauréats 2016.
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Afrique Contemporaine Alain Henry, n°254, 2015/2
[...] Sophie Caratini a fait le choix original de laisser son héros s’exprimer à la première personne, pour mieux entrer dans son univers culturel singulier. Une forme littéraire, inaugurée par Oscar Lewis dans Les Enfants de Sanchez, qui va au bout du projet anthropologique. Comme si le narrateur mêlait en une seule voix la claire logique d’un Lévi-Strauss et le souffle d’un Hampâté Bâ, afin de nous conter la vie d’un peuple. Ici, l’auteur (et son lecteur à travers elle) est parfois interpellé par le narrateur. Le résultat est saisissant. À travers les mille histoires d’une vie singulière, on entre dans la compréhension inédite d’une nation, de sa poésie, sa sagesse, sa vision anthropologique ou son histoire politique.
Les poèmes et les proverbes qui ponctuent chaque chapitre sont l’écho des nombreux aphorismes qui sont rapportés ou bien filés dans le texte, à la façon dont les griots composent leur art oratoire, si proche du théâtre classique : « J’étais rentré au pays pour saisir les reflets de mon ombre sur la rive et dans l’eau… »
Chemin faisant, le lecteur découvre la géographie mentale du monde ouest-africain. Il peut admirer la vue panoramique sur la vallée du fleuve Sénégal, sa faune et son intensité écologique, aujourd’hui largement détruites. Ailleurs, il est initié à la science commerciale – dont Moussa Wagne se révèle être un expert – qui règle les échanges économiques sur de longues distances, tissant en même temps des liens serrés entre les populations de Dakar à Maïdougouri, au Nigeria, et au-delà… Plus loin, le lecteur est conduit dans un pèlerinage à La Mecque, dont il suit les étapes et les rituels, ainsi que les transformations des cœurs et des esprits qu’ils produisent.
Avec son regard propre, l’anthropologue met en lumière les structures de parenté, les représentations sociales, les institutions, ainsi que la manière de donner sens aux situations sociales qui, ensemble, fondent une vision singulière de la vie commune (ce que l’on nomme « culture »). « Les hommes du lignage de ton père sont tes pères, y apprend-on, et les hommes du lignage de ta mère sont tes oncles. Et du côté des femmes, c’est pareil, tu as des mères et des tantes. » On saisit de l’intérieur l’identité des castes et des lignées, comme nous l’enseigne la triste histoire d’un vieillard qui, capturé dans son très jeune âge, ayant vécu et donné naissance à une famille d’esclaves, retrouve son village et sa naissance noble… mais sans se résoudre à revenir. [...]
L’ambition du livre est également historique et politique. Il entend faire mémoire des rapports coloniaux. Il raconte la colonisation… vue d’en face. Il montre comment les Blancs ont bousculé l’ordre social et jeté les destins individuels à tous les vents d’une histoire imposée de l’extérieur. Les vies de Moussa et des siens sont celles de leur siècle. Ils ont vécu la répression féroce menée contre la première grève des cheminots à Thiès en 1938. Puis le débarquement de Provence, où de nombreux soldats africains – rebaptisés "sénégalais" – ont été mis en première ligne et sont morts pour libérer une terre qui n’était pas la leur.
On suit – comme dans les deux tomes précédents – les marches harassantes des colonnes méharistes, leur économie sociale (les officiers français, leur femme mauresque, les goumiers et leur famille maure, les tirailleurs noirs, les pileuses de mil et les bordels de campagne), et aussi leur ordre colonial (un curieux mélange de discipline militaire, d’inégalités raciales et d’égalité républicaine, ignorantes des hiérarchies locales). [...]
Cette longue histoire porte ses questions inévitables. Ainsi, il semble que, face aux décombres, Moussa éprouve surtout la nostalgie d’une société disparue. Dans un prochain opus, Sophie Caratini reprendra la parole pour dévoiler les coulisses de sa recherche et croiser les fils des trois récits de sa trilogie. Souhaitons qu’elle éclaire alors ce qu’est la modernité africaine et ce qu’elle pourrait devenir, face à la mondialisation qui poursuit inéluctablement son œuvre déstabilisante.
En attendant, les trois livres le montrent bien : l’approche anthropologique a une sûre capacité à décrire les principes généraux qui gouvernent en propre chaque société. La lecture des Sept Cercles, au-delà des accents épiques, est indispensable à qui veut enfin briser le cercle de l’ignorance qui, depuis l’époque coloniale jusqu’à celle du « développement », a malmené la vie des hommes : « J’ai constaté, dit Moussa Wagne, que les Français ne s’intéressaient pas du tout à nos coutumes, qu’ils ne cherchaient ni à les comprendre, ni à en tenir compte. Ce livre, poursuit-il, c’est pour nous redonner une place. […] Car les bouleversements qui ont défiguré ce pays, personne ne les comprend ici, et là-bas, en France, personne ne les connaît. »
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Les poèmes et les proverbes qui ponctuent chaque chapitre sont l’écho des nombreux aphorismes qui sont rapportés ou bien filés dans le texte, à la façon dont les griots composent leur art oratoire, si proche du théâtre classique : « J’étais rentré au pays pour saisir les reflets de mon ombre sur la rive et dans l’eau… »
Chemin faisant, le lecteur découvre la géographie mentale du monde ouest-africain. Il peut admirer la vue panoramique sur la vallée du fleuve Sénégal, sa faune et son intensité écologique, aujourd’hui largement détruites. Ailleurs, il est initié à la science commerciale – dont Moussa Wagne se révèle être un expert – qui règle les échanges économiques sur de longues distances, tissant en même temps des liens serrés entre les populations de Dakar à Maïdougouri, au Nigeria, et au-delà… Plus loin, le lecteur est conduit dans un pèlerinage à La Mecque, dont il suit les étapes et les rituels, ainsi que les transformations des cœurs et des esprits qu’ils produisent.
Avec son regard propre, l’anthropologue met en lumière les structures de parenté, les représentations sociales, les institutions, ainsi que la manière de donner sens aux situations sociales qui, ensemble, fondent une vision singulière de la vie commune (ce que l’on nomme « culture »). « Les hommes du lignage de ton père sont tes pères, y apprend-on, et les hommes du lignage de ta mère sont tes oncles. Et du côté des femmes, c’est pareil, tu as des mères et des tantes. » On saisit de l’intérieur l’identité des castes et des lignées, comme nous l’enseigne la triste histoire d’un vieillard qui, capturé dans son très jeune âge, ayant vécu et donné naissance à une famille d’esclaves, retrouve son village et sa naissance noble… mais sans se résoudre à revenir. [...]
L’ambition du livre est également historique et politique. Il entend faire mémoire des rapports coloniaux. Il raconte la colonisation… vue d’en face. Il montre comment les Blancs ont bousculé l’ordre social et jeté les destins individuels à tous les vents d’une histoire imposée de l’extérieur. Les vies de Moussa et des siens sont celles de leur siècle. Ils ont vécu la répression féroce menée contre la première grève des cheminots à Thiès en 1938. Puis le débarquement de Provence, où de nombreux soldats africains – rebaptisés "sénégalais" – ont été mis en première ligne et sont morts pour libérer une terre qui n’était pas la leur.
On suit – comme dans les deux tomes précédents – les marches harassantes des colonnes méharistes, leur économie sociale (les officiers français, leur femme mauresque, les goumiers et leur famille maure, les tirailleurs noirs, les pileuses de mil et les bordels de campagne), et aussi leur ordre colonial (un curieux mélange de discipline militaire, d’inégalités raciales et d’égalité républicaine, ignorantes des hiérarchies locales). [...]
Cette longue histoire porte ses questions inévitables. Ainsi, il semble que, face aux décombres, Moussa éprouve surtout la nostalgie d’une société disparue. Dans un prochain opus, Sophie Caratini reprendra la parole pour dévoiler les coulisses de sa recherche et croiser les fils des trois récits de sa trilogie. Souhaitons qu’elle éclaire alors ce qu’est la modernité africaine et ce qu’elle pourrait devenir, face à la mondialisation qui poursuit inéluctablement son œuvre déstabilisante.
En attendant, les trois livres le montrent bien : l’approche anthropologique a une sûre capacité à décrire les principes généraux qui gouvernent en propre chaque société. La lecture des Sept Cercles, au-delà des accents épiques, est indispensable à qui veut enfin briser le cercle de l’ignorance qui, depuis l’époque coloniale jusqu’à celle du « développement », a malmené la vie des hommes : « J’ai constaté, dit Moussa Wagne, que les Français ne s’intéressaient pas du tout à nos coutumes, qu’ils ne cherchaient ni à les comprendre, ni à en tenir compte. Ce livre, poursuit-il, c’est pour nous redonner une place. […] Car les bouleversements qui ont défiguré ce pays, personne ne les comprend ici, et là-bas, en France, personne ne les connaît. »
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Centre Norbert Elias Dorothée Dussy, Charles Grémont, 3 décembre 2015
Les Rendez-Vous de "La fabrique des écritures innovantes en sciences sociales"
Discutants : Dorothée Dussy (CNRS/CNE) Charles Grémont (IRD/LPED)
3 décembre 2015, 17h-18h30
Centre Norbert Elias, Marseille
Accéder aux informations
Discutants : Dorothée Dussy (CNRS/CNE) Charles Grémont (IRD/LPED)
3 décembre 2015, 17h-18h30
Centre Norbert Elias, Marseille
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France Culture Marie-Hélène Fraïssé, 14 novembre 2015
Il était une fois le Sahara
Émission "Tout un Monde", entretien avec Marie-Hélène Fraïssé, 14 novembre 2015, 19h-19h30
Réécouter l'émission
Émission "Tout un Monde", entretien avec Marie-Hélène Fraïssé, 14 novembre 2015, 19h-19h30
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La Cause Littéraire Martine L. Petauton, 5 mai 2015
Il est des livres qui valent voyage, et bien davantage ; au cœur du continent-mère, l’Afrique, mais, plus encore, aux racines de l’homme. N’en doutez pas. Celui-ci en est un ! Il est des auteurs, qu’on regrette vraiment de n’avoir pas côtoyés plus tôt ! Celle-là en est une : anthropologue, fine et solide connaisseuse de son Afrique Sahélienne, prêtant son écriture – conteuse, passionnante comme sous l’arbre à palabres – à un homme formidable, Moussa Djibi Wagne (nommé sur le tard Al-Hadji Moussa Djibi Wagne, après qu’il ait fait son pèlerinage à La Mecque). Un homme rare, par sa vie – une épopée antique – sa personnalité, son regard sur lui-même et le reste du monde – entendez l’Afrique de l’Ouest – son humour, sa mélancolie. Un Ulysse, comme le dit le sous-titre du livre. Pas moins.
Ça se lit comme le roman que ce n’est pas, ça sonne comme une saga largement dépassée. Du certifié vrai, mais raconté de telle façon ! Entre les dires foisonnants de Moussa, des siens – somme d’entretiens de belle teneur savante – et le personnage qui dit « je » dans le livre, l’écriture de Sophie Caratini, la magie de son « raconté », fabrique un petit miracle : l’anthropologie littéraire et son immense efficacité.
Moussa est né quelque part au bord du fleuve Sénégal en 1918 (mort en 2007), et c’est un très vieux « Msé » de plus de 80 ans, qui rassemble les pans de sa mémoire aiguisée, pour le magnétophone de l’anthropologue. « Je suis né dans le Fouta Toro. De la race des Halpoular’en, gens qui parlent la langue Peule… la race de l’homme, c’est sa langue, rien d’autre ».
Et de raconter, comme seuls les gens d’Afrique racontent [...].
Cercles de la vie, là-bas, en ce temps-là, de sa vie à lui ; pages de l’Histoire de tous, de la nôtre, par ricochets. Partout, d’anciennes connaissances, en guise de petits cailloux de Poucet, des femmes épousées, répudiées, libérées : « j’en ai épousé puis répudié quatre ; aucune ne m’a convenu ; finalement, j’ai laissé tomber » (petit manuel de la polygamie qui en remontre à nos représentations), des naissances, et, sur le tard, le retour au bord du fleuve. Toujours, c’est Allah qui choisit, mais la sorcellerie rôde encore et pas seulement chez les Animistes : « c’est un oncle qui a demandé à un féticheur de fabriquer quelque chose qui ait le pouvoir de t’éloigner d’abord, puis de lier ta mémoire pour t’empêcher de revenir ». Et, c’est ainsi, qu’on se retrouve à errer 40 ans en dehors de son village… Quand on nous dit Odyssée ! et que passent de drôles de Circé !
« Chronique Peule de ce temps-là », aurait pu être le titre du livre, car récit pointilleux, organisé, qui sait passionner son lecteur, étancher sa curiosité sur les usages – ce qu’on plante, mange, cuisine ; comment on fréquente – de loin – les filles ; les mots pour dire, ici, puis là, les différences – considérables – entre ce qu’on fait au bord du Sénégal Mauritanien et plus près de l’embouchure… Et puis, l’Histoire, la grande, vue d’yeux d’ici, auxquels on ne la fait pas ! Fortes pages… Ainsi, 1989, et les terribles massacres Maures/Noirs appuyés sur la Dictature Mauritanienne, correspondant au retour du vieil enfant dans son village : « puis tout le monde est devenu fou, au nord, comme au sud du fleuve ». Regard politique de Moussa, sa verve campant sur son expérience ; livre ouvert sur l’Histoire de ce XXème siècle Sahélien… La Colonisation, l’Indépendance, l’aide au « développement »…
On l’aura compris, formidable chronique d’un temps qu’on a perdu, et qui nous est redonné par les voix de Moussa et de son enchanteuse. Mais, tellement plus que ça ; poésie, émotions, nostalgie… C’est tout Moussa, et son monde, qui est entré en nous ! Superbe réussite.
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Ça se lit comme le roman que ce n’est pas, ça sonne comme une saga largement dépassée. Du certifié vrai, mais raconté de telle façon ! Entre les dires foisonnants de Moussa, des siens – somme d’entretiens de belle teneur savante – et le personnage qui dit « je » dans le livre, l’écriture de Sophie Caratini, la magie de son « raconté », fabrique un petit miracle : l’anthropologie littéraire et son immense efficacité.
Moussa est né quelque part au bord du fleuve Sénégal en 1918 (mort en 2007), et c’est un très vieux « Msé » de plus de 80 ans, qui rassemble les pans de sa mémoire aiguisée, pour le magnétophone de l’anthropologue. « Je suis né dans le Fouta Toro. De la race des Halpoular’en, gens qui parlent la langue Peule… la race de l’homme, c’est sa langue, rien d’autre ».
Et de raconter, comme seuls les gens d’Afrique racontent [...].
Cercles de la vie, là-bas, en ce temps-là, de sa vie à lui ; pages de l’Histoire de tous, de la nôtre, par ricochets. Partout, d’anciennes connaissances, en guise de petits cailloux de Poucet, des femmes épousées, répudiées, libérées : « j’en ai épousé puis répudié quatre ; aucune ne m’a convenu ; finalement, j’ai laissé tomber » (petit manuel de la polygamie qui en remontre à nos représentations), des naissances, et, sur le tard, le retour au bord du fleuve. Toujours, c’est Allah qui choisit, mais la sorcellerie rôde encore et pas seulement chez les Animistes : « c’est un oncle qui a demandé à un féticheur de fabriquer quelque chose qui ait le pouvoir de t’éloigner d’abord, puis de lier ta mémoire pour t’empêcher de revenir ». Et, c’est ainsi, qu’on se retrouve à errer 40 ans en dehors de son village… Quand on nous dit Odyssée ! et que passent de drôles de Circé !
« Chronique Peule de ce temps-là », aurait pu être le titre du livre, car récit pointilleux, organisé, qui sait passionner son lecteur, étancher sa curiosité sur les usages – ce qu’on plante, mange, cuisine ; comment on fréquente – de loin – les filles ; les mots pour dire, ici, puis là, les différences – considérables – entre ce qu’on fait au bord du Sénégal Mauritanien et plus près de l’embouchure… Et puis, l’Histoire, la grande, vue d’yeux d’ici, auxquels on ne la fait pas ! Fortes pages… Ainsi, 1989, et les terribles massacres Maures/Noirs appuyés sur la Dictature Mauritanienne, correspondant au retour du vieil enfant dans son village : « puis tout le monde est devenu fou, au nord, comme au sud du fleuve ». Regard politique de Moussa, sa verve campant sur son expérience ; livre ouvert sur l’Histoire de ce XXème siècle Sahélien… La Colonisation, l’Indépendance, l’aide au « développement »…
On l’aura compris, formidable chronique d’un temps qu’on a perdu, et qui nous est redonné par les voix de Moussa et de son enchanteuse. Mais, tellement plus que ça ; poésie, émotions, nostalgie… C’est tout Moussa, et son monde, qui est entré en nous ! Superbe réussite.
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L'Hebdo des Notes bibliographiques MRH, 27 février 2015
Sophie Caratini présente ici, sous la forme d’un dialogue dont on ne lit que les réponses, une magnifique description de l'Afrique occidentale française des années cinquante et des débuts de la période postcoloniale.
Dressant un portrait réaliste et attachant d'un peul musulman authentique et convaincu, entreprenant mais tourmenté par ses démons intérieurs, elle fait toucher du doigt les coutumes d'antan dévastées par les colonisateurs, puis par les tenants du « progrès » et enfin par l'apparition des frontières et des rivalités ethniques.
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Dressant un portrait réaliste et attachant d'un peul musulman authentique et convaincu, entreprenant mais tourmenté par ses démons intérieurs, elle fait toucher du doigt les coutumes d'antan dévastées par les colonisateurs, puis par les tenants du « progrès » et enfin par l'apparition des frontières et des rivalités ethniques.
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Parutions.com Gilles Ferragu, 6 février 2015
D’une immensité l’autre
[...] Parti de Sayé, un petit village sur la frontière entre le Sénégal et la Mauritanie, Moussa gagne Dakar, avant de traverser le désert malien, puis le Nigeria, le Cameroun, jusqu’à l’Arabie Saoudite et la Mecque. Et au long-cours de ses voyages, tel un ibn Battuta moderne, Moussa a vécu, aimé, parlé et écouté, il a observé les autres – Maures, Peuls, Bambara, Wolof, Toubabs, etc. – et appris leur langues et coutumes. En une vie, il a découvert à la fois ce qui constitue l’unité de l’Afrique, et ce qui en fait l’hétérogénéité.
Ses mémoires tracent un portrait du continent et de la colonisation, perçue par un homme à la fois simple et curieux, observateur subtil de ce qui l’entoure. On pourrait souligner la qualité de l’écriture, le sens de l’anecdote et du détail, la couleur et la chaleur du texte, et le plaisir surtout, l’immense plaisir qu’il y a à parcourir ce livre. On pourrait aussi remarquer la manière habile avec laquelle Moussa présente sa foi, un islam heureux, parfois un peu sentencieux, mais toujours ouvert à l’autre. On pourrait également évoquer la société rurale qui, au rythme des mots de Moussa, se dévoile au lecteur, fasciné par une vie autre que celle d’internet et de la consommation à outrance. On pourrait enfin mettre en lumière l’histoire d’un jeune homme engagé malgré lui dans l’armée française, et qui donne à voir, de l’intérieur, cette «force noire» tant vantée par le général Mangin. Il y a en effet tout cela, et bien d’autres choses dans ces mille-et-une vies de Moussa Wagne.
Alors, pour quiconque rêve d’étendues, d’immensités, d’Afrique et de voyage, ce livre assurera un vrai bonheur de lecture, à ranger dans le rayons des grands voyageurs et des grands récits d’anthropologie. Le texte est aussi riche que le personnage : on s’approprie aisément cette vie, cette histoire, on fait un moment corps avec ce personnage et cette vie dense vue à hauteur d’homme. Surtout, c’est l’occasion de découvrir une grande et belle plume, Sophie Caratini, qui sait donner à cette fresque saharienne la puissance d’une odyssée antique.
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[...] Parti de Sayé, un petit village sur la frontière entre le Sénégal et la Mauritanie, Moussa gagne Dakar, avant de traverser le désert malien, puis le Nigeria, le Cameroun, jusqu’à l’Arabie Saoudite et la Mecque. Et au long-cours de ses voyages, tel un ibn Battuta moderne, Moussa a vécu, aimé, parlé et écouté, il a observé les autres – Maures, Peuls, Bambara, Wolof, Toubabs, etc. – et appris leur langues et coutumes. En une vie, il a découvert à la fois ce qui constitue l’unité de l’Afrique, et ce qui en fait l’hétérogénéité.
Ses mémoires tracent un portrait du continent et de la colonisation, perçue par un homme à la fois simple et curieux, observateur subtil de ce qui l’entoure. On pourrait souligner la qualité de l’écriture, le sens de l’anecdote et du détail, la couleur et la chaleur du texte, et le plaisir surtout, l’immense plaisir qu’il y a à parcourir ce livre. On pourrait aussi remarquer la manière habile avec laquelle Moussa présente sa foi, un islam heureux, parfois un peu sentencieux, mais toujours ouvert à l’autre. On pourrait également évoquer la société rurale qui, au rythme des mots de Moussa, se dévoile au lecteur, fasciné par une vie autre que celle d’internet et de la consommation à outrance. On pourrait enfin mettre en lumière l’histoire d’un jeune homme engagé malgré lui dans l’armée française, et qui donne à voir, de l’intérieur, cette «force noire» tant vantée par le général Mangin. Il y a en effet tout cela, et bien d’autres choses dans ces mille-et-une vies de Moussa Wagne.
Alors, pour quiconque rêve d’étendues, d’immensités, d’Afrique et de voyage, ce livre assurera un vrai bonheur de lecture, à ranger dans le rayons des grands voyageurs et des grands récits d’anthropologie. Le texte est aussi riche que le personnage : on s’approprie aisément cette vie, cette histoire, on fait un moment corps avec ce personnage et cette vie dense vue à hauteur d’homme. Surtout, c’est l’occasion de découvrir une grande et belle plume, Sophie Caratini, qui sait donner à cette fresque saharienne la puissance d’une odyssée antique.
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Fuutamedia Abderrahmane N'Gaïdé, 29 janvier 2015
Quand les Maures ont commencé à massacrer les Noirs…
Quand Sophie Caratini, anthropologue bien connue pour ses multiples travaux sur les Rgeybats, prête sa plume à Moussa Djibi Wagne, c’est une partie inconnue de l’histoire de la vallée, de la Mauritanie et de la diaspora noire qui se raconte avec un style qui reflète une forte oraluture qui donne au texte une allure agréable. Ecriture parlée qui laisse passer entre les mailles des idées développées, des éléments clés d’une histoire, certes personnelle, mais qui peut [et qui a sa place] se rattacher à celle globale non seulement du sud mauritanien, mais de l’ensemble du territoire mauritanien. Cette perspective m’a donné une envie fiévreuse de partager avec vous ces quelques lignes pour vous inciter à plonger au fond de cette histoire « inédite ».[...]
Moussa Djibi Wagne est fort de sa longue expérience d’exilé, malgré lui. Il pratiquait 14 langues ! C’est donc un homme accompli, ayant passé plusieurs années hors de cette réalité où « chacun a sa place, une place qui lui est assignée dès la naissance par ses ancêtres », qui épouse une nouvelle façon de voir les choses ; au point qu’il revendique sa marque de différence : « …je ne suis pas comme les autres : je raconte volontiers mes histoires, c’est plus rare, par ici » [p. 13]. Il a bien mesuré l’importance du témoignage dont il récusait la pertinence à cause du poids de la société et de la méfiance généralisée [pour ne pas dire l’autocensure devenue une donnée typiquement mauritanienne, surtout chez les acteurs ou non acteurs du sud après tous les traumatismes]. C’est ce courage et cette façon de parler de soi, des autres et de la Mauritanie qui fascinent. Un subalterne qui « s’écrit » à cœur ouvert quelques années avant sa disparition [2007] et qui constate que « les bouleversements qui ont défiguré ce pays [la Mauritanie], personne ne les comprend ici, et là-bas, en France, personne ne les connaît. Pourtant les Français y sont pour quelque chose. Ce sont eux qui ont créé des différences entre les Noirs de la vallée et les Maures du désert… ils capturaient les Noirs quand ils avaient besoin de soldats, ils les prenaient aussi pour les faire travailler de force. Ils n’ont jamais fait ça avec les Maures, ils les ont colonisés autrement. Et quand ils sont partis, ils leur ont donné le pouvoir alors que nous, ils nous ont coupés en deux en faisant du fleuve une frontière » [p. 16].
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Quand Sophie Caratini, anthropologue bien connue pour ses multiples travaux sur les Rgeybats, prête sa plume à Moussa Djibi Wagne, c’est une partie inconnue de l’histoire de la vallée, de la Mauritanie et de la diaspora noire qui se raconte avec un style qui reflète une forte oraluture qui donne au texte une allure agréable. Ecriture parlée qui laisse passer entre les mailles des idées développées, des éléments clés d’une histoire, certes personnelle, mais qui peut [et qui a sa place] se rattacher à celle globale non seulement du sud mauritanien, mais de l’ensemble du territoire mauritanien. Cette perspective m’a donné une envie fiévreuse de partager avec vous ces quelques lignes pour vous inciter à plonger au fond de cette histoire « inédite ».[...]
Moussa Djibi Wagne est fort de sa longue expérience d’exilé, malgré lui. Il pratiquait 14 langues ! C’est donc un homme accompli, ayant passé plusieurs années hors de cette réalité où « chacun a sa place, une place qui lui est assignée dès la naissance par ses ancêtres », qui épouse une nouvelle façon de voir les choses ; au point qu’il revendique sa marque de différence : « …je ne suis pas comme les autres : je raconte volontiers mes histoires, c’est plus rare, par ici » [p. 13]. Il a bien mesuré l’importance du témoignage dont il récusait la pertinence à cause du poids de la société et de la méfiance généralisée [pour ne pas dire l’autocensure devenue une donnée typiquement mauritanienne, surtout chez les acteurs ou non acteurs du sud après tous les traumatismes]. C’est ce courage et cette façon de parler de soi, des autres et de la Mauritanie qui fascinent. Un subalterne qui « s’écrit » à cœur ouvert quelques années avant sa disparition [2007] et qui constate que « les bouleversements qui ont défiguré ce pays [la Mauritanie], personne ne les comprend ici, et là-bas, en France, personne ne les connaît. Pourtant les Français y sont pour quelque chose. Ce sont eux qui ont créé des différences entre les Noirs de la vallée et les Maures du désert… ils capturaient les Noirs quand ils avaient besoin de soldats, ils les prenaient aussi pour les faire travailler de force. Ils n’ont jamais fait ça avec les Maures, ils les ont colonisés autrement. Et quand ils sont partis, ils leur ont donné le pouvoir alors que nous, ils nous ont coupés en deux en faisant du fleuve une frontière » [p. 16].
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ArtsixMic Rédaction, 15 janvier 2015
Sophie Caratini nous livre son troisième opus sur l’empire colonial français avec le témoignage d’un paysan peul, engagé comme tirailleur sénégalais, Moussa Djibi Wagne.
Une vérité et une transparence qui donnent à ces récits une authenticité et une puissance hors du commun.
Silencieuse durant ces trois volumes, un quatrième est attendu dans lequel Sophie Caratini montera à son tour sur scène, avec armes et bagages, pour dévoiler les coulisses de cette aventure scientifique, humaine et littéraire au long cours. De grands et très bons moments de lecture.
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Une vérité et une transparence qui donnent à ces récits une authenticité et une puissance hors du commun.
Silencieuse durant ces trois volumes, un quatrième est attendu dans lequel Sophie Caratini montera à son tour sur scène, avec armes et bagages, pour dévoiler les coulisses de cette aventure scientifique, humaine et littéraire au long cours. De grands et très bons moments de lecture.
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